Combat de Courson les Carrières du 26 décembre 1870

Courson les Carrières, Yonne      combat le 26 décembre 1870

Depuis la mi-novembre 1870 le nord de l’Yonne est totalement occupé, la partie sud est seulement surveillée par des troupes de réserves prussiennes mais ses voies de communications seront continuellement harcelées par les bataillons de gardes mobilisés de l’Yonne, aidés par des bataillons venant de la Côte d’Or, du Morbihan, de la Nièvre et plusieurs compagnies de francs-tireurs.

 ⃰ pendant toute la durée de cette guerre, les francs-tireurs ont fait une guérilla sans merci contre les prussiens et bien souvent achevaient leurs blessés. Ils étaient fusillés sans autre forme de procès lorsqu’ils étaient pris par les prussiens 

Début décembre 1870 le sud du département n’étant pas occupé, la situation était relativement calme et permettait aux troupes françaises de se réorganiser et de pouvoir lancer des coups de mains dans le nord du département contre les prussiens, ce qui leur coutaient souvent de nombreux morts lorsque qu’ils s’aventuraient hors de leurs bases pour effectuer des réquisitions dans les villages environnants ou opérer des reconnaissances.                                                                                              

  A la mi-décembre changement de situation, les prussiens apprennent qu’une armée française est en formation à Nevers sous les ordres du général Bourbaki et pensent tout d’abord qu’elle va secourir les armées du général Chanzy qui combattent toujours avec acharnement et souvent victorieusement autour de Beaugency et de Tours.  

Le quartier général prussien envoie aussitôt le 7e corps d’armée du général von Zastrow, qui était stationné à Montargis, envahir l’Yonne sur une ligne Montargis, Charny, Joigny, Auxerre, Tonnerre, afin de surveiller cette armée française et se tenir prêt à intervenir sur ses flancs. 

13e division d’infanterie, général von Bothmer, et le 8e régiment hussards, colonel Arendt    14e division d’infanterie, général von Senden, 15e régiment hussards, colonel von Cosel                                                                                 

Le 20 décembre 1870 après des combats sporadiques menés par des gardes nationaux, et un bombardement de la ville, le maire d’Auxerre monsieur Lepère hisse le drapeau blanc et demande l’arrêt des combats, la ville est alors envahie par la 25e brigade d’infanterie du général von Osten-Sacken, et le major Blumenthal nommé commandant de la place. Le même jour le colonel von Bischofshausen du 55e régiment d’infanterie envahit Chablis et Tonnerre Le 22 décembre 1870 tout le sud de l’Yonne est totalement envahi.

13e régiment d’infanterie colonel von Bussche-Handdenhausen                    et 73e régiment d’infanterie colonel von Loebel

Du côté français, le lieutenant-colonel Carrière ⃰  avait rassemblé à Clamecy (58) des bataillons de gardes mobilisés de l’Yonne  ⃰  des groupes de francs-tireurs, ainsi que des bataillons de gardes mobiles  ⃰  ⃰  ⃰  du Morbihan, de l’Indre, de la Côte d’Or et de l’Aube soit environ 3000 hommes, qui bien que peu aguerris au combat, montreront toujours un courage sans faille tout au long de ce conflit.

Louis Joseph Carrière né le 19 mars 1836, lieutenant au 2e régiment de zouaves au début du conflit, nommé capitaine le 4 octobre 1870, élu lieutenant-colonel de la garde nationale le 16 novembre 1870                                                                                           

   ⃰  Hommes âgés de 20 à 40 ans, qui pour des raisons diverses non pas été enrôlés dans l’armée régulière, ni dans la garde mobile, et sont seulement chargés de défendre leur département d’origine     

⃰  ⃰  ⃰  Jeunes gens âgés de 20 à 30 ans, qui par un bon tirage au sort n’avaient pas été appelés dans l’armée régulière, mais devaient rester en réserve pendant 5 ans, en faisant de courtes périodes d’entrainement militaires plusieurs fois dans l’année, ils pouvaient être appelés dans tout le territoire français   

Carrière homme énergique faisait surveiller continuellement les troupes prussiennes par des reconnaissances et les attaquait par surprise lorsque celles-ci étaient peu nombreuses, afin de créer un climat d’insécurité chez l’ennemi. Rendus furieux les prussiens pillaient et brûlaient systématiquement les villages où des leurs avaient été attaqués, mais rien ni faisait, et aidé par la population locale, les raids français continuaient et plusieurs prussiens disparurent dans des embuscades.   

Après la guerre en 1876, un rapport de l’état-major prussien a reconnu environ 250 soldats « disparus » dans l’Yonne, en indiquant une liste possible d’endroits de ces disparitions, ainsi à Chevillon le 20 novembre 1870 un groupe de 8 soldats, Toucy en décembre une patrouille de 10 hussards etc. etc.  , tous les corps étaient souvent enterrés dans des bois et non jamais pu être retrouvés.   

Dès qu’il apprend l’envahissement du sud de l’Yonne Carrière envoie des petites compagnies très mobiles d’environ 100 hommes dans tout le sud de l’Yonne, avec pour mission d’attaquer les patrouilles prussiennes et tous les groupes isolés. C’est une de ces patrouilles qui va se heurter le 26 décembre 1870 à Courson les Carrières à un escadron du 8e régiment de hussards commandé par lieutenant von Steuplitz.

Le général von Osten-Sacken, qui venait d’envahir Auxerre avait disposé tous ses régiments  sur une ligne Toucy Auxerre, Chablis, Tonnerre, afin de surveiller les troupes françaises de Clamecy et Nevers dont il ne connaissait pas le nombre exact, mais qui lui faisait chaque jour plus de victimes.    

Les 13e et 73e, cités plus haut, ainsi que le 15e régiment d’infanterie colonel Delitz,     le 55e régiment d’infanterie, colonel  von Bischofshausen,  le 8e régiment de hussards, lieutenant-colonel Arendt et le 7e bataillon de chasseurs, colonel Kamecke  

Le 24 décembre le lieutenant von Steuplitz, qui patrouillait dans la région, arrive à Courson avec quelques cavaliers pour faire ferrer ses chevaux et manger à l’hôtel, sans aucun acte d’hostilité de la population envers lui, mais un habitant du village court prévenir une compagnie de francs-tireurs de la Vienne ⃰ qui patrouillait dans la forêt de Frétoy.                                                

 capitaine M. Robin environ 170 hommes

Informé du petit nombre de cavaliers de la patrouille prussienne, et persuadé qu’ils vont revenir, le commandant Robin décide de se cacher avec ses hommes dans des maisons et tout alentour du village, bien décidé à combattre.

Le 26 décembre le lieutenant von Steuplitz revient cette fois avec un demi-escadron (environ 30 cavaliers) avec la mission de patrouiller jusqu’à Coulanges sur Yonne, toujours pour surveiller les troupes françaises qui sont à Clamecy.  Il traverse donc Courson sans méfiance, lorsque soudain il est attaqué par un feu roulant des francs-tireurs. Plusieurs cavaliers tombent, d’autres sont démontés, leurs chevaux tués sous eux, le lieutenant tente de regrouper ses hommes et de se défendre, mais doit reculer sous le nombre et surtout s’aperçoit que ce sont des francs-tireurs et que ceux-ci ne feront pas de quartier.  Il tente alors une sortie par le nord du village mais il est de nouveau accueilli par un feu nourri des francs-tireurs, postés là, et qui attendaient sa retraite. La débandade devient générale et le lieutenant von Steuplitz parvient à regrouper la quinzaine de cavaliers qui lui reste, et à rejoindre les deux compagnies du 7e bataillon de chasseurs qui étaient postées à Ouanne. Le lieutenant-colonel Arendt qui était à Toucy alerté, arrive le soir même à Ouanne avec tout son bataillon et deux canons, mais en raison de l’obscurité, préfère remettre au lendemain ses représailles sur Courson, où par prudence il envoie quelques patrouilles reconnaitre l’état des forces françaises, qu’il craint supérieures.

Le 27 au matin assuré qu’il n’y a plus de francs-tireurs ni de troupes françaises il fait placer, à l’ouest du village sur une colline en direction du hameau de Molesmes, deux canons braqués sur Courson, fait placer des postes tout autour du village afin que personne ne puisse sortir, et laisse ses soldats se livrer au pillage pendant deux heures, il frappe aussi le village d’une amende de 10 000 francs et prend trois otages   jusqu’au règlement complet de la somme imposée.

   Jacquin, Rappin et Boussard, qui seront libérés le 26 février 1870                                                   

Quant au lieutenant von Steuplitz il demande au maire où sont passés la quinzaine de cavaliers qui sont tombés la veille, ce dernier lui affirme qu’ils ont été emmenés prisonniers par les francs-tireurs et que seul deux hussards retrouvés morts le veille au soir dans des maisons, sont inhumés au cimetière.  Von Steuplitz n’en croit pas un mot et fait fouiller le moindre recoin du village, et fait rouvrir la tombe pour vérifier qu’il y a bien que deux cavaliers, sans résultat pour les cavaliers prussiens disparus. Après la guerre en 1872, l’état-major prussien envoya une note au gouvernement français afin d’avoir des précisions sur les 14 hussards fait prisonnier à Courson le 26 décembre 1870, et qui n’étaient pas revenus de leur captivité. Des recherches entreprises par les autorités françaises ne donnèrent aucun résultat. En 1874 l’armée allemande adressait une plainte au colonel Du Temple, chef de la région militaire de Nevers, pour assassinat des 14 hussards, par le capitaine Robin, ce dernier étant connu pour « ne pas faire de prisonniers » mais faute de preuve il fut acquitté par le tribunal de Nevers. Après consultation des registres de prisonniers prussiens à Clamecy (archives militaires de Vincennes) il n’est pas fait état des 14 hussards du 8e régiment, et qui auraient dû être normalement enregistrés après leur capture.                                                                                

Conclusion de l’auteur : Les 14 hussards dont une bonne partie étaient blessés ont été vraisemblablement abattus et enterrés dans la forêt de Frétoy

Sépulture des deux hussards tués à Courson le 26-12-1870                                       Tombe militaire, loi du 4 avril 1873

Photo Jean Paul Blanchard

Les noms n’ont pas pu être retrouvés, recherche en cours